Ce week-end était mon week-end annuel de pélerinage dans notre capitale... Petits endroits fétiches, balades sous la pluie et expos, mon programme était, comme toujours, très simple. Cette année pourtant, je venais avec quelques questions à adresser à mes désormais confrères bruxellois :

Dans l'ordre : "Quelle est votre prise de position à propos du Covid Safe Ticket?" - "Comment faites-vous?" - "Avez-vous eu des contrôles?"

Avant même d'avoir pu ouvrir la bouche, on me l'a demandé, ce Covid Safe Ticket. J'en ai été assez désarçonnée mais j'ai fouillé dans mon sac, trouvé mon téléphone, pianoté sur l'appli ad hoc et présenté 'patte blanche'. J'ai quand même posé mes questions mais c'était pure rhétorique. Après 1 mois de lancement du CST dans l'horeca à Bruxelles, c'est sans appel, tout le monde l'applique et la police, quant à elle, applique les contrôles. Il n'y a pour autant pas d'excès de zèle mais tous, policiers comme tenanciers, sont premiers de classe. J'avoue, je me suis sentie un peu bête... Que pouvaient-ils faire d'autre? Le reste du week-end, j'ai trimballé mon vieux smartphone et son chargeur car en panne de batterie, toutes les portes se fermaient.

Durant, ces dernières semaines, on nous a beaucoup posé la question à Louise et à moi:

"Qu'allez-vous faire en novembre? Vous allez nous demander le CST?".

Nous vous avions répondu invariablement non.

"Non, on ne vous le demandera pas. Nous refusons que l'Etat se déresponsabilise auprès de l'horeca. Nous refusons de vous demander un certificat ou une pièce d'identité quelconque. Notre café se veut inclusif".

Et aujourd'hui, à la veille de réouvrir après ce long week-end, je nous sens coincées : entre nos valeurs et la réalité. Une amende équivaudrait probablement pour Café Joli à mettre la clé sous la porte. Les montants sont astronomiques (jusqu'à 2500 euros par infraction) et notre ASBL ne peut pas tenir la distance. Et en toute transparence, nous préférons que nos bénéfices servent à l'achat de livres et à l'organisation d'événements culturels...

En écrivant ces lignes, j'ai peur de demain, du premier client à qui on demandera de montrer ce précieux sésame. Que ferons-nous si cette personne n'en possède pas? Refuser de la servir? C'est tellement aux antipodes du lieu que l'on a créé! Je me sens en colère contre ce gouvernement qui nous oblige à endosser ce rôle de contrôle... qui lui revient et pour lequel il s'est engagé! Je n'ai aucune légitimité à vous demander quoique ce soit, je n'en ai aucune envie et j'enrage de me voir obligée à le faire. A ce stade du récit, vous avez évidemment compris ce que je m'apprête à écrire noir sur blanc :

Oui, à partir de demain (3 novembre), nous vous demanderons le Covid Safe Ticket mais nous ne vous mettrons pas dehors. C'est le compromis, un peu bancal il est vrai, qu'on a trouvé...

Notre position est ambigüe, nous en sommes conscientes... Mais nous en appelons à la responsabilité de chacun.

Chers clients, chers amis avec qui nous partageons nos cafés, nos rires et nos avis... entendez nos excuses de vous soumettre à ce contrôle... et marchez avec nous <3

Bisous,

Noé & Lou